Article | 22 Juin, 2021

Quatre sites du patrimoine mondial dont la Grande Barrière pourraient être « en péril » tandis que Selous risque de perdre son statut, conseille l'UICN

L'UICN, conseiller officiel pour la nature auprès du Comité du patrimoine mondial de l'UNESCO, recommande l'inscription de quatre sites naturels sur la Liste du patrimoine mondial en péril : la Grande Barrière en Australie, le Complexe W-Arly-Pendjari au Bénin, au Burkina Faso et au Niger, le Patrimoine naturel et culturel de la région d'Ohrid en Albanie et en Macédoine du Nord, et les Volcans du Kamchatka en Russie. L'UICN recommande également de retirer la Réserve de gibier de Selous en Tanzanie de la Liste du patrimoine mondial, en raison des dommages irréversibles causés par la construction du projet hydroélectrique Julius Nyerere.

Les recommandations de l'UICN, faites conjointement avec le Centre du patrimoine mondial de l'UNESCO, ont été publiées hier soir. Elles seront examinées par le Comité du patrimoine mondial lors de sa prochaine réunion du 16 au 31 juillet.

Patrimoine mondial naturel en péril

La Liste du patrimoine mondial en péril est un mécanisme conçu pour mobiliser des actions urgentes afin d’assurer la conservation des sites confrontés à de graves menaces. Si l'avis de l'UICN est suivi par le Comité du patrimoine mondial, quatre sites pourraient être ajoutés à cette liste, qui compte actuellement 17 sites naturels du patrimoine mondial.

Le statut en péril est recommandé pour la Grande Barrière en raison de la vitesse et de l'ampleur sans précédent du déclin de sa faune marine et de ses écosystèmes. Malgré les gros efforts et investissements de l'Australie pour mettre en œuvre son plan de durabilité « Reef 2050 », les impacts du changement climatique, y compris une séquence d'épisodes de blanchiment des coraux en 2016, 2017 et 2020, ont causé d'importants dommages au site. En outre, les effets cumulatifs de plusieurs menaces, telles que la mauvaise qualité de l'eau, réduisent la résilience du récif l'aidant à faire face à des pressions grandissantes. L'UICN recommande des efforts redoublés de toute urgence aux niveaux mondial et local pour sauvegarder la Grande Barrière.

Le Complexe W-Arly-Pendjari au Bénin, au Burkina Faso et au Niger est recommandé pour inscription sur la Liste du patrimoine mondial en péril en raison des impacts de l'insécurité croissante dans la région du Sahel. Le personnel de gestion au Burkina Faso a été contraint d'abandonner les parcs W et Arly dû à la présence de groupes terroristes armés. Par conséquent, les activités illégales telles que le braconnage, le pâturage et l'orpaillage ont augmenté dans ces deux parties du site transfrontalier.

Le statut en péril est recommandé pour le Patrimoine naturel et culturel de la région d'Ohrid en Albanie et en Macédoine du Nord, classé pour ses valeurs naturelles et culturelles. Le site, qui abrite le plus ancien lac d'Europe, est sous pression continue de multiples menaces, telles que des projets d'infrastructure à grande échelle, une pollution accrue, le développement urbain incontrôlé et l'exploitation côtière.

Le site du patrimoine mondial des Volcans du Kamchatka en Russie pourrait également être ajouté à la liste en péril car ses limites ont été modifiées dans le but d’accueillir un grand projet d'infrastructures touristiques à l'intérieur du site. Celles-ci incluraient un terminal où accosteraient les navires de croisière dans la baie encore intacte de Viluchinskade, une nouvelle autoroute et plusieurs installations touristiques. Le projet entraînerait une grave détérioration de la valeur panoramique exceptionnelle du site.

Retrait de la Liste du patrimoine mondial proposé pour la Réserve de gibier de Selous

La construction du projet hydroélectrique Julius Nyerere, anciennement connu sous le nom de projet de barrage Stiegler's Gorge, est déjà bien avancée dans la Réserve de gibier de Selous en Tanzanie, l'un des plus grands sites du patrimoine mondial de la planète. Une grande partie des infrastructures liées au projet sont maintenant construites, comme son tunnel de dérivation du fleuve, ses routes, ses ponts et ses bureaux, au sein même du site. Les barrages avec de grands réservoirs sont considérés comme incompatibles avec le statut de patrimoine mondial, et le Comité du patrimoine mondial a demandé à plusieurs reprises que le projet ne se poursuive pas.

Le barrage de 130 mètres de haut sur le plus grand fleuve du pays, le Rufiji, devrait inonder 125 000 hectares de nature sauvage qui abrite de nombreuses espèces menacées, notamment l'éléphant de savane africaine « En danger » et le rhinocéros noir « En danger critique d'extinction », tous deux la cible du braconnage. La réserve de Selous a été inscrite sur la Liste du patrimoine mondial en 1982 pour ses écosystèmes intacts et sa haute densité de faune. Le projet de barrage ayant engendré des dommages irréversibles à ces valeurs, l'intégrité du site est désormais perdue. Ces impacts ont conduit le Centre du patrimoine mondial de l'UNESCO et l'UICN à recommander le retrait du site de la Liste du patrimoine mondial.

Extensions du site du patrimoine mondial des forêts de hêtres en Europe

Dans ses évaluations des sites proposés pour une éventuelle inscription sur la Liste du patrimoine mondial, publiées plus tôt dans le mois, l'UICN recommande deux nouveaux sites du patrimoine mondial en Géorgie et au Japon. En outre, l'UICN recommande d'approuver certaines parties d'une proposition d'extension des Forêts primaires et anciennes de hêtres des Carpates et d’autres régions d’Europe.

Le site, d’abord inscrit en 2007 puis agrandi en 2011 et 2017, comprend actuellement 78 zones de forêts de hêtres dans 12 pays d'Europe. L'extension proposée pour 2021 comprendrait 29 zones supplémentaires, ainsi que six modifications de zones existantes, dans 10 pays. L'UICN recommande d'approuver toutes les modifications et d'inscrire 15 nouvelles zones en Bosnie-Herzégovine, en Tchéquie, en France, en Italie, en Macédoine du Nord, en Pologne, en Slovaquie et en Suisse.

Hébergée par Fuzhou en Chine, la 44e session élargie du Comité du patrimoine mondial de l’UNESCO se déroulera entièrement en ligne.