Communiqué de presse | 26 Juin, 2024

L’éléphant de Bornéo classé « En danger » sur la Liste rouge de l’UICN

Gland, Suisse, 27 juin 2024 (UICN) - L’éléphant de Bornéo a été évalué comme « En danger » en raison de menaces provenant d’activités humaines, selon la mise à jour d’aujourd’hui de la Liste rouge de l’UICN des espèces menacées™. La mise à jour révèle également que des espèces de serpents envahissants poussent les reptiles endémiques des îles Canaries et d’Ibiza vers l’extinction, tandis que le commerce illégal et les changements climatiques menacent les cactus du Chili.

La Liste rouge de l’UICN comprend désormais 163 040 espèces, dont 45 321 menacées d’extinction, dépassant ainsi l’objectif du Baromètre de la vie d’évaluer 160 000 espèces.

« La Liste rouge de l’UICN guide les actions de conservation depuis soixante ans. Comme le montre la mise à jour de la Liste rouge d’aujourd’hui, la biodiversité fait face à des pressions croissantes, du braconnage aux changements climatiques, en passant par la propagation d’espèces envahissantes. Heureusement, la Liste rouge propose également des solutions. Grâce à des mesures de conservation soutenues, collaboratives et scientifiques à une échelle suffisante, nous pouvons sauver les espèces de l’extinction », a déclaré la Dr Grethel Aguilar, Directrice générale de l’UICN.

L’éléphant de Bornéo est en danger

L’éléphant d’Asie à Bornéo est « En danger », selon sa première évaluation en tant que sous-espèce distincte sur la Liste rouge de l’UICN, qui a révélé qu’il ne restait qu’environ 1 000 individus à l’état sauvage à Bornéo. La population a diminué au cours des 75 dernières années, initialement en raison d’une exploitation forestière intensive des forêts de Bornéo, qui a détruit la majorité de l’habitat des éléphants. Du fait de la rapide croissance démographique sur l’île de Sabah, les éléphants pénètrent plus souvent dans les paysages dominés par l’Homme à la recherche de nourriture, où ils endommagent les cultures et subissent des représailles fatales. La perte d’habitat est également due à l’agriculture (en particulier l’huile de palme), aux plantations forestières, à l’exploitation minière et à de grands projets d’infrastructure, tels que l’autoroute pan-Bornéenne, qui menacent l’avenir des éléphants de Bornéo. Le braconnage d’ivoire, l’ingestion accidentelle de produits agrochimiques et les collisions avec les véhicules sont également source de préoccupation.

« Au cours des deux dernières décennies, des efforts considérables ont été déployés à la fois pour comprendre et pour conserver les éléphants de Bornéo. Ces activités sont vitales pour assurer un avenir à cette sous-espèce et permettre un développement socioéconomique sans heurt dans les zones où les éléphants sont présents », a déclaré Augustine Tuuga, Directrice du Département de la faune sauvage de Sabah et membre du Groupe de spécialistes des éléphants d’Asie de la CSE-UICN.

Déclin vertigineux des reptiles sur les îles de Gran Canaria et Ibiza

Les espèces de reptiles de l’île de Gran Canaria subissent un déclin significatif du fait de la présence d’espèces de serpents envahissants. Le lézard géant de Gran Canaria (Gallotia stehlini) est passé de la catégorie « Préoccupation mineure » à « En danger critique » et le scinque de Gran Canaria (Chalcides sexlineatus) de « Préoccupation mineure » à « En danger ». Ces animaux endémiques sont la proie de la couleuvre royale de Californie (Lampropeltis californiae), introduite sur l’île en 1998. Les populations de lézard géant de Gran Canaria, comme celles de scinque de Gran Canaria, ont diminué de plus de moitié depuis 2014.

Toujours sur les îles Canaries, des mesures de conservation ont stimulé les populations du lézard géant de La Gomera (Gallotia bravoana), malgré les menaces persistantes. Le statut de l’espèce est passé d’« En danger critique » à « En danger » à la suite de programmes d’élevage en captivité et de réintroduction. Endémique de son île éponyme, cette espèce autrefois commune a presque disparu à cause des chats et des rats, envahissants sur l’île, ainsi que de la chasse par les humains dont elle a été victime pendant plusieurs siècles. Cependant, l’espèce est toujours fortement menacée par les chats sauvages, ainsi que par les glissements de terrain, susceptibles de devenir plus fréquents en raison des changements climatiques.

Le lézard des Pityuses (Podarcis pityusensis) est passé de « Quasi menacé » à « En danger », sa population ayant diminué de 50% depuis 2010 sous la pression de la couleuvre fer-à-cheval (Hemorrhois hippocrepis), une espèce envahissante.

Le commerce illégal menace les cactus d’ornement

Quatre-vingt-deux pour cent des espèces de cactus copiapoa sont aujourd’hui menacées d’extinction, contre 55% en 2013. La mode des cactus copiapoa en tant qu’espèces ornementales en Europe et en Asie a entraîné une augmentation du commerce illégal de ces espèces endémiques du désert côtier d’Atacama, au Chili, facilitée par les réseaux sociaux. Le développement de routes et de logements a augmenté la population humaine dans la région, rendant les plantes plus accessibles aux braconniers et détruisant leur habitat désertique. Les changements climatiques menacent également ces cactus, le brouillard océanique dont ils ont besoin pour s’hydrater évoluant avec les changements de température mondiale, et ces espèces à longue durée de vie ne pouvant pas se reproduire assez rapidement pour coloniser de nouveaux territoires en conséquence.

« Il est facile de distinguer si les cactus copiapoa ont été braconnés ou cultivés en serre », a expliqué Pablo Guerrero, Investigateur principal à l'Institut d'écologie et de biodiversité, Professeur associé à l'Université de Concepción, et membre du Groupe de spécialistes des cactus et plantes succulentes de la CSE-UICN. « Les copiapoa braconnés ont un ton gris et sont recouverts d’un duvet à l’aspect poussiéreux qui protège les plantes dans l’un des déserts les plus secs de la planète, tandis que les plantes cultivées semblent plus vertes ».

Une collaboration entre les pays est essentielle pour empêcher le transport international de plantes braconnées. De plus, la culture du copiapoa en serre a le potentiel de constituer une alternative durable pour fournir des cactus au marché mondial.

Citations de référence :

« Cette dernière mise à jour de la Liste rouge de l’UICN comprend des milliers d’évaluations d’arbres, y compris de nombreuses espèces autochtones de Bornéo. La diversité des espèces d’arbres présentes à Bornéo fournit des habitats vitaux aux oiseaux et aux mammifères, mais beaucoup sont menacés d’extinction. Des ateliers collaboratifs, organisés de façon présentielle comme en ligne, ont réuni tout un éventail d’experts et de partenaires locaux, et se sont avérés essentiels pour identifier avec succès les espèces d’arbres les plus menacées afin de hiérarchiser les mesures de conservation », a déclaré Kathryn Fowler, Responsable de la conservation, Botanic Gardens Conservation International.

« La récente mise à jour de la Liste rouge de l’UICN est à la fois prometteuse et décourageante, mais souligne le rôle fondamental des évaluations scientifiques pour guider les priorités et les mesures de conservation. Cette mise à jour nous rappelle que les études et inventaires de terrain, que ce soit avec des jumelles ou des filets à papillons traditionnels ou grâce à des techniques de pointe comme l’ADN environnemental ou les moniteurs acoustiques autonomes, restent les éléments constitutifs de mesures de conservation efficaces », a déclaré Anne Bowser, PDG de NatureServe.

« Cette dernière mise à jour de la Liste rouge révèle un niveau de menace scandaleusement élevé pour les cactus copiapoa, dont quatre-vingt-deux pour cent ont été identifiés comme étant en danger d’extinction. Pire encore est l’augmentation si rapide de ce pourcentage par rapport aux 55% de la dernière évaluation majeure des cactus. Les cactus et plantes succulentes du monde entier font actuellement l’objet d’une demande exceptionnellement élevée en tant qu’espèces ornementales, ce qui aggrave les menaces actuelles des changements de couverture des sols et des pressions liées au climat. La Liste rouge tire la sonnette d’alarme pour une action urgente visant à sauver ces espèces menacées », a déclaré le Dr Steven Bachman, Responsable de recherche en Évaluation et analyse de la conservation aux Jardins botaniques royaux Kew.

« Les espèces océaniques du monde entier sont également vulnérables aux changements climatiques mondial ainsi qu’à la pollution et à la surpêche, mais les menaces pour les invertébrés marins ne sont pas encore bien comprises », a déclaré la Professeur Julia Sigwart, Présidente de l’Autorité de la liste rouge des invertébrés marins et Directrice de l’unité de Malacologie à l’Institut de recherche Senckenberg et au Musée de Francfort. « Nous travaillons avec la Liste rouge de l’UICN pour évaluer et protéger autant d’espèces d’invertébrés marins que possible. »

« En 2010, l’objectif du Baromètre de la vie avait été fixé à 160 000 espèces. Cette mise à jour de la Liste rouge de l’UICN dépasse ce chiffre phare, mais met également en évidence les défis à venir : bien que les plantes et les animaux soient sur la bonne voie, il reste encore beaucoup de travail à faire en ce qui concerne les invertébrés et les champignons. Pour certains groupes, il est essentiel d’augmenter le nombre d’espèces évaluées. Pour d’autres, les réévaluations mettent en lumière l’évolution du risque d’extinction au fil du temps. La Liste rouge de l’UICN reste plus utile que jamais pour guider les engagements nationaux en faveur du Cadre mondial de Kunming-Montréal pour la biodiversité », a déclaré le Professeur Jon Paul Rodríguez, Président de la Commission de l’UICN pour la sauvegarde des espèces.

« La perte d’habitats, combinée aux conflits homme- faune, continue de constituer une menace pour la faune sauvage et les communautés vivant à ses côtés, et cela a été mis en évidence par l’évaluation des éléphants d’Asie de Bornéo comme « En danger ». Alors que nous travaillons à l’échelle mondiale pour protéger et restaurer la nature pour tous, il est essentiel que nous travaillions avec les communautés locales pour comprendre les défis auxquels elles sont confrontées et les aider à développer des interventions communautaires qui les aideront à coexister pacifiquement avec la faune sauvage », a déclaré Mike Hoffmann, Responsable de la récupération de la faune sauvage chez ZSL.